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amateur de salé
14 octobre 2006

Salé : potiers de père en fils

Ils sont une centaine à faire de l’argile leur propre muse. A Salé, les potiers sont des artisans de père en fils, des protecteurs d’un patrimoine qui risque de se perdre. De nos jours, de moins en moins de jeunes sont disposés de mettre «la main à la pâte». Oulja. C’est ici où se dresse le Complexe artisanal de Salé. Ce lundi, le début d’après-midi annonce des températures en hausse. Pourtant, le parking est au complet comme presque tous les jours. Nombreux sont les Slaouis et les Rbatis qui bravent la chaleur pour découvrir ce que cachent ces petites échoppes nichées à l’intérieur du complexe. Vases, chandeliers, cendriers, tasses, assiettes, tagines et autres pièces sont exposés sur des étagères au milieu et tout autour des murs de cette boutique N° 9 : «Poterie Al Attar». Difficile de résister, les curieux, qui comptaient juste jeter un coup d’œil, restent des heures à contempler les œuvres artisanales aux formats et aux couleurs aussi divers que nombreux. A droite de cette boutique, se trouve une porte qui donne sur l’atelier de confection. Silence absolu, la créativité a besoin de concentration, mais aussi de beaucoup de doigté. Ali Al Attar, propriétaire du local, est assis sur un petit tabouret en bois, près de la porte. Les rayons du soleil lui servent de projecteur naturel pour vérifier la teneur des couleurs et l’esthétique. Devant lui, une palette et de petites tasses fraîchement décorées. Ali trempe son pinceau dans un récipient et poursuit la décoration d’une assiette. «C’est un service à café que je termine en ce moment», explique-t-il tout doucement. Quelques minutes plus tard, il s’arrête pour admirer le résultat : «C’est bon ! Vous savez, les dessins que nous réalisons sont très différents des autres potiers comme ceux de Safi. A Salé, ce sont des lignes fines en forme de la Khoulala ou de feuilles d’arbres que nous avons l’habitude de reproduire. Notre poterie est reconnaissable par le fait qu’elle est moins chargée.» Ali Al Attar est potier depuis trente ans. Aujourd’hui, la cinquantaine bien portante, il ne lui arrive jamais de regretter d’avoir suivi les traces de son père. «J’avais une grande curiosité pour la poterie, parce que mon père était l’un des artisans slaouis les plus méticuleux. Il m’a tout appris au point que je suis devenu un véritable passionné de la poterie», raconte-t-il. Si Ali se montre aussi enthousiaste en parlant de son travail, il l’est moins lorsqu’il prend le temps de réfléchir à l’avenir. Il confie qu’il est peu probable que ses enfants empruntent son chemin. « Non, non! Mes enfants n’y pensent même pas. La poterie pour eux, c’est un labeur et rien de plus. Ils ont d’autres préoccupations comme l’informatique, par exemple», reconnaît-il. Dans cet atelier, tous les artisans ont la quarantaine ou la cinquantaine. Peu de jeunes sont là sauf pour assister momentanément un Maâllem qui confectionne une pièce sur son tour. Abdellah Tamakracht a l’air suspendu sur cet appareil en bois que les artisans appellent «Al Maoûne ». C’est le tour que ne cesse de faire pivoter Abdellah à l’aide de ses pieds. Une fois la pâte d’argile sur le tour du Maâllem, ce dernier entame un mouvement circulaire. Au moyen d’une éponge imbibée d’eau, d’une mesure en bois et surtout d’un grand doigté, l’argile se soumet aux désirs de son maître pour prendre la forme qu’il veut. «Je peux confectionner tout type de pièces, il n’y a pas de spécialité. Tout dépend plutôt de la commande qu’on reçoit. Et bien sûr, les grandes pièces demandent beaucoup plus de temps et d’énergie», explique Abdellah qui exerce de ce métier depuis vingt ans. Au fur et à mesure que le plat en argile prend forme, le jeune assistant veille à ce que le Maâllem n’ait besoin de rien et travaille la pâte d’argile qui servira à confectionner d’autres pièces. C’est un peu plus loin, en plein air, que l’argile est entreposée. Elle est d’abord soumise à un processus de filtration avant de devenir une pâte. Tout commence par de grosses pierres d’argile dites de type bleu, noir et jaune qui sont mises dans un bassin rempli d’eau. Elles y fondent, puis vient le travail du filtrage et du tamisage dont s’occupent en majorité les jeunes assistants. L’argile qui en résulte est alors séchée sous le soleil. «Toutes ces étapes, on les suspend lorsqu’il pleut. Nous avons alors recours aux stocks d’argile pendant l’hiver. Cela me rappelle la fable de la Cigale et de la fourmi», ajoute le propriétaire. Pour les potiers, le travail dure donc toute l’année, six jours sur sept, sauf le mois du congé annuel. Abdellah a terminé le plat en argile qu’il vient de décoller du tour en utilisant un fil. Chaque jour, de 20 à 30 pièces sont fabriquées ainsi. Elles passent, ensuite, chez un autre artisan qui devra, lui, réaliser leur partie inférieure avant de les envoyer vers l’artisan qui les mettra au four. «Il faudra attendre neuf heures avant de sortir ces pièces», explique Ahmed Masoûdi, chargé de veiller sur le bon déroulement de la cuisson. La poterie est tout un travail de chaîne dont les maillons doivent tous partager cet amour pour le métier. Abdellah, originaire de la région de Marrakech est tout aussi passionné que Ali, le Slaoui, mais il avoue tout de même ne pas vouloir que ses enfants deviennent eux aussi potiers. « Les potiers ne vivent pas tous dans de bonnes conditions. Si dans cet atelier, nous avons la sécurité sociale, dans d’autres, il n’y a rien et les artisans n’ont pas le droit de tomber malade», s’indigne-t-il. Payés entre 60 et 100 DH par jour, les potiers ne sont pas tous satisfaits de leurs conditions. Légime : ne pas travailler ne serait-ce qu’une journée, équivaut à ne rien avoir pour manger. Terrible fatalité qui conduit plusieurs comme Abdellah à ne pas souhaiter à leurs enfants de connaître cette vie de misère où de nombreux artisans vivent en silence. Les propriétaires s’en défendent arguant une demande vascillante et de grosses dépenses que nécessite l’entreprise. Al Attar et d’autres comme lui au complexe de l’Oulja prouvent que ce ne sont là que de fausses allégations. Al Attar est même l’un des rares propriétaires à avoir mis en place un four à gaz afin d’éviter la pollution qu’entraînent les fours traditionnels d’où sortent des fumées asphyxiantes. «Le four m’a coûté 8 millions de centimes que j’ai empruntés à mes amis et mes proches. L’Etat ne nous aide pas même par des crédits, par exemple», tient-il à souligner. Pour aller de l’avant, des sacrifices sont consentis de part et d’autre. Et même si les potiers manquent parfois de pot, leur passion pour l’argile ne s’amenuise jamais, car elle est éternelle. Le 13-10-2006 Par : Leïla Hallaoui aujourd'uit maroc

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Commentaires
N
bonjour je recherche un livre des fables de la fontaine en dialecte marocain pour mon ami qui a grandi au Maroc ; qui peut m'aider a trouver une piste...merci!<br /> nathalie.pinta@laposte.net
H
moi hamid de fes ana mo3jaboo biki wa biaraiki al jamila atamana tokhriji lana charit jadid mirci
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